juillet 2003 - octobre 2003 : notre coup de gueule

Une nouvelle fois, il n'est pas proposé d'inscrire en pleins droits dans la loi française les effets du PaCS en matière d'immigration et séjour.
Quelles sont les conséquences ? H
omosexuels et lesbiennes, n'ayant pas accès au mariage, restent ainsi à la merci des arbitraires et des pratiques administratives. En effet leurs droits sont régis par circulaire, télégramme, jurisprudence du Conseil d'Etat, la loi elle, n'inscrivant qu'un "élément d'appréciation".
Après 3 ans de pratique du PaCS, on aurait pu penser à un rapprochement vers l'égalité entre homos et hétéros en matière de droits à l'immigration et au séjour. Il n'en est rien. Pire, Sarkozy propose un durcissement pour les couples hétérosexuels: passage d'un an à 2 ans pour l'obtention de la carte de résident, condition de communauté de vie, contrôles renforcés et suspicion quasi systématique pour les mariages binationaux et peut être ce qui est le plus grave, car lourd de conséquence sur nos dossiers, la quasi condition de régularité du séjour pour se marier. Comment allons nous faire pour régulariser les couples pacsés qui ont aujourd'hui pratiquement obligation de passer par une phase irrégularité pour remplir les conditions d'accès au séjour ?

 
mariage
pacs
première année plein droit si entré régulière :
carte 1 ans vie privée & familliale (VPF)

sans papier (fabriqué par le loi du PaCS)
donc pratiquement rien : éventuellement APS ou récipissé ou au mieux carte visiteur (sans aucun droit avec condition de ressources et visa long séjour)

deuxième année

plein droit :
carte résidant 10 ans (avant Sarkozy)
carte VPF 1 an (après Sarkozy)

carte VPF 1 an (si un partenaire français) basé sur un télégramme
essentiellement via une procédure de régularisation car avant sans papier
résidant

loi : après1 an (avant Sarkozy)
loi : après 2 ans (après Sarkozy)

loi : après 4 ans (1+3 mais pratiquement jamais obtenue avant 6 ans) (avant Sarkozy)
loi : après 6 ans (1+5 mais non de plein droit avec conditions d'intégration) (après Sarkozy)

nationalité

loi : après 1 an (après Sarkozy)
loi : après 2 ans (après Sarkozy)

rien dans la loi - sans effet direct.

On ne va pas développer les autres points du projet de loi, l'analyse du GISTI le fait très bien mais beaucoup de points inquiétants : maire dans la commission des titres de séjour (une tribune de plus pour les maires homo/lesbo/xéno/.../phobes qui n'ont rien à faire là à notre avis), retard de la carte de résident, difficultés supplémentaires dans l'obtention des visas, plus de punitions, durée de rétention multipliée par 6, plus de contrôles et conditions, etc ...

En résumé : contrôle, surveiller, punir ...
ce ne sont que des régressions de droits qui nous sont proposées !
Les homosexuels et lesbiennes vont un nouvelle fois en faire doublement les frais !!!

LOI SARKOZY relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France
adoptée le 28/10/2003 - publié au JO le 26 novembre 2003

Les débats au Sénat
Les débats à l'Assemblée Nationale
L'avis du Conseil Constitutionnel

La version imprimable de « Contrôler, surveiller, punir »,
l'analyse du projet de réforme Sarkozy sur l'entrée et le séjour des étrangers faite par le GISTI

LOI du 10 décembre 2003 modifiant la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile
Avis de la CNCDH sur le projet de loi modifiant la loi n° 52-893 relative au droit d’asile

 

Extrait du débat du jeudi 9 octobre 2003

(...)
M. LE PRÉSIDENT. – Amendement n° 250 rectifié, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Marie- Claude Beaudeau, Beaufils, Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine, Didier, MM. Fischer, Foucaud, Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite, Renar, Mme Terrade et M. Vergès. Rédiger comme suit cet article :

Après le douzième alinéa (11°) de l'article 12 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

… – À l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, ayant conclu un pacte civil de solidarité avec un ressortissant de nationalité française depuis au moins un an, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière et que le conjoint ait conservé la nationalité française.

M. BRET. – La loi du 15 novembre 1999 relative au Pa.C.S. stipule que « la conclusion d'un pacte civil de solidarité constitue l'un des éléments d'appréciation des liens personnels en France » pour l'obtention d'un titre de séjour. Cette rédaction laisse trop de pouvoir d'appréciation à l'administration dans la délivrance de la carte de séjour temporaire « vie privée et familiale ». Ce, malgré les circulaires d'application.

Les réponses en la matière varient d'une préfecture à une autre. J'ai eu à appuyer des demandes de titres de séjour pour des couples binationaux pacsés et j'ai constaté que les réponses sont effectivement différentes d'un département à un autre. Certaines préfectures refusent même de recevoir les demandes ! Il faut assurer l'égalité devant la loi, au moyen d'instructions claires. Nous vous proposons que l'ordonnance de 1945 mentionne les couples pacsés binationaux. Nous réglerions ainsi des problèmes très délicats pour des situations peu nombreuses – trois cents cas au 1er janvier 2001 – dont l'association pour la reconnaissance des droits des personnes homosexuelles et transsexuelles à l'immigration et au séjour, l'ARDHISS, nous a saisi récemment, monsieur le Ministre.

Nous reconnaîtrions mieux la communauté homosexuelle, en luttant contre l'homophobie. Certains s'alarmeront peut- être du risque de « Pa.C.S. blancs »…

M. BRAYE. – Il y en a déjà !

M. BRET. – Le législateur a consacré le Pa.C.S., il faut garantir l'égalité du citoyen devant la loi !

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PaCS et conditions de séjour en France : halte aux injustices !
Act Up-Paris - SOS Homophobie. Communiqué de presse commun.

le 7 octobre 2003

Après avoir été adopté en première lecture par l’Assemblée Nationale le 9 juillet dernier, le projet de loi relatif à la maîtrise de l’immigration et au séjour des étrangers en France est examiné par le Sénat à compter de mercredi. Comme nous l’avions rappelé lors de l’examen par les député(e)s il y a quelques semaines, ce texte est une bonne occasion de mettre fin à une série d’injustices faites aux couples pacsés binationaux, notamment en ce qui concerne l’obtention d’un titre de séjour régulier pour le conjoint pacsé étranger. C’est pourquoi, au nom du principe d’égalité des droits entre couples hétérosexuels et homosexuels, SOS homophobie et Act Up-Paris demandent aux sénateurs et sénatrices français d’amender le texte en ce sens et de modifier l’article 12 bis de l’Ordonnance n°45-2658 du 2 novembre 1945.

Quatre ans après le vote de la loi sur le Pacte Civil de Solidarité (Pacs), obtenir un titre de séjour en France pour les couples dits mixtes ou binationaux reste un véritable parcours du combattant. A l’inverse du mariage qui confère au conjoint étranger " de plein droit " un titre de séjour, le Pacs ne produit pas automatiquement d’effet de droit. Ainsi, les couples mixtes ou binationaux pacsés se retrouvent bien seuls face au pouvoir d’appréciation de l’administration française, qui seule décidera, au regard des liens tissés entre les conjoints, si un titre de séjour peut être délivré au demandeur. En effet, le Pacs n’est considéré que comme un " élément d’appréciation " parmi d’autres pour l’obtention d’un titre de séjour.

Ne pourrait-on pas faire plus simple, plus juste et plus équitable ? En effet, si le cadre juridique reste flou, la situation sur le terrain n’en est pas moins compliquée pour les couples binationaux. Les préfectures apprécient au cas par cas les demandes qui leur sont faites et une demande faite à Strasbourg pourra être refusée alors qu’elle sera acceptée à Bordeaux. Sont, systématiquement, hors jeu d’entrée les couples plus récents, ceux ayant fait un détour par l’étranger ou les personnes partageant leur vie mais vivant dans des logements différents.

C’est pourquoi SOS homophobie et Act Up-Paris en appellent aux sénateurs et sénatrices de ce pays afin de faire cesser ces injustices et ainsi permettre que les partenaires pacsés, sans distinction de nationalité, puissent être clairement mentionnés dans une nouvelle mouture de l’ordonnance du 2 novembre 1945 comme bénéficiaires des mesures permettant l’obtention d’un premier titre de séjour au même titre que les conjoints. Une refonte de la loi permettrait d’accorder aux couples pacsés binationaux une liberté fondamentale, celle du droit à une vie privée et familiale.

Plus généralement, nos deux associations demandent aux politiques, et notamment au gouvernement, de prendre toutes les mesures nécessaires pour améliorer la situation des couples pacsés. SOS homophobie et Act Up-Paris n’oublient pas que ce point fait partie des engagements de campagne du Président Chirac. Nous resterons vigilants !

 

Communiqué du 10 juillet 2003

Projet de loi sur l'immigration : et le PaCS dans tout ça ?

Le 3 juillet dernier, a débuté à l'Assemblée Nationale l'examen du projet de loi de maîtrise de l'immigration et de séjour des étrangers en France. Ce projet aurait pu être une bonne occasion pour le gouvernement de mettre en oeuvre les engagements pris pendant la dernière campagne électorale par le chef de l'Etat en matière d'amélioration de la situation des couples pacsés. Raté ! Comme dans de nombreux domaines (fiscalité, retraite, bioéthique…), le gouvernement semble gêné dès qu'il est question de PaCS. MM. Raffarin et Sarkozy ont donc préféré le statu quo au détriment des couples pacsés binationaux.

En marge du caractère largement répressif du projet de loi, le gouvernement avait souhaité voir facilités et améliorés l'accueil et l'intégration des étrangers en situation régulière : une bonne occasion de proposer des améliorations sensibles du cadre juridique du PaCS. Les inégalités de la loi sur le pacte civil de solidarité restent criantes entre couples mariés et pacsés.

Rappelons notamment que :

Actuellement, à la différence des couples mariés, les conditions d'appréciation du droit au séjour des couples pacsés sont déterminées par le pouvoir réglementaire et par le juge, en fonction de l'existence de liens personnels et familiaux, les instructions ministérielles prévoyant une condition de vie commune d'un an. De plus, ces dispositions restent appliquées de manière différente d'une préfecture à une autre.
Le regroupement familial n'est pas accessible aux couples pacsés, l'ordonnance du 2 novembre 1945 n'ouvrant cette possibilité qu'aux conjoints.
L'étranger ayant conclu un PaCS ne semble pas protégé contre une mesure de reconduite à la frontière ou une expulsion.

Par ailleurs, les dispositions du projet de loi sur l'immigration allongent le délai pour les étrangers mariés avec un-e Français-e à deux ans pour obtenir une carte de résident. Doit-on s'attendre au même traitement pour les couples pacsés ? Il y a fort à parier que, dans ce cas-là, le traitement des couples pacsés soit aligné sur celui des couples mariés, quitte à faire machine arrière sur les avancées du PaCS.

Ainsi, après avoir observé l'attitude du gouvernement lors de nombreux débats, SOS homophobie s'étonne des difficultés que rencontre le gouvernement lorsqu'il s'agit de discuter de réformes législatives du PaCS. Après le refus de supprimer le délai de trois ans imposé aux couples pacsés avant de pouvoir établir une déclaration commune de revenu, le gouvernement a préféré, lors du débat sur les retraites, passer sous silence l'ouverture de nouveaux droits sociaux (notamment la pension de reversion) pour les couples pacsés.

Au nom du principe d'égalité des droits entre couples hétérosexuels et homosexuels défendu ardemment par SOS homophobie, nous demandons au gouvernement, aux députés et aux sénateurs d'amender le projet de loi afin d'offrir aux couples pacsés les mêmes droits que les couples mariés. Enfin, plus généralement, nous souhaitons que le gouvernement précise ses intentions sur les éventuelles modifications qu'il souhaite apporter au pacte civil de solidarité dans les mois à venir.

SOS homophobie
c/o CGL
3 rue Keller
BP 255
75524 Paris cedex 11
www.sos-homophobie.org
Ligne d'écoute anonyme : 0 810 108 135 ou 01 48 06 42 41

Contact presse :
Ronan Rosec : 06.81.04.91.76 / sos@sos-homophobie.org

 

Extrait du débat du mardi 8 juillet 2003

(...)

M. Christophe Caresche - Notre amendement 252 a pour objet de permettre à un étranger ayant conclu un Pacs avec un ressortissant de nationalité française d'accéder de plein droit à une carte temporaire. La circulaire du 10 décembre 1999 le prévoit déjà, mais il serait bon de l'inscrire dans la loi. Notons qu'au 1er juillet 2001, seulement 300 demandes avaient été déposées à ce titre.

M. Goasguen défend, je crois, un amendement identique.

M. Claude Goasguen - Non, pas identique.

Le Pacs est un sujet tabou de la République...

M. Noël Mamère - Absolument pas !

M. Claude Goasguen - Avec le contrôle désormais plus sévère des mariages blancs, il est à craindre que certains se reportent sur des « Pacs blancs ».

M. Patrick Braouezec - C'est incroyable d'entendre cela !

M. Claude Goasguen - Vous ne vouliez pas reconnaître non plus la réalité des mariages blancs !

Si l'on ne veut pas que cette institution nouvelle soit détournée à son tour, il faut fixer un cadre juridique précis. Par mon amendement 165, je propose donc de reprendre la notion de vie commune telle qu'elle avait été retenue pour le volet fiscal, c'est-à-dire en retenant un délai de trois ans. On évitera ainsi la fraude.

M. le Rapporteur - M. Caresche se réfère à un Pacs conclu depuis au moins un an, tandis que l'amendement de M. Goasguen le veut conclu depuis trois ans au moins. Dans les deux cas, la commission a émis un avis défavorable.

Les dernières données disponibles ne font état que de 300 demandes au titre du Pacs. Je crois donc préférable que les préfectures continuent d'examiner les dossiers au cas par cas. Le dispositif actuel offre de la souplesse, l'article 12 de la loi de 1999 relative au Pacs disposant que celui-ci est « un élément d'appréciation » pour la délivrance d'un titre de séjour. Dans la mesure où il n'y a pas à ce jour de fraude avérée, et compte tenu de la difficulté de lutter contre les Pacs de complaisance, il ne paraît pas nécessaire de légiférer sur le sujet. Mieux vaut laisser de la souplesse aux préfectures (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP).

M. le Ministre - Actuellement, un étranger pacsé avec un Français a droit à un titre de séjour après un an de vie commune, comme l'a confirmé un télégramme de M. Vaillant daté du 4 avril 2002. Faut-il l'inscrire dans la loi, comme le propose M. Caresche, en portant même à trois ans la durée de vie commune exigée, comme le propose M. Goasguen ? Je partage l'avis de la commission : laisser les préfectures étudier les demandes au cas par cas est préférable. Des dispositions législatives sur ce point risqueraient de faire naître des filières d'immigration, qui aujourd'hui n'existent pas. Enfin, s'est-on plaint à vous de dysfonctionnements, d'injustices ou d'une trop grande sévérité des préfectures ? Pour ma part, je n'ai rien entendu à ce sujet. La sagesse commande, je le crois, de conserver le dispositif actuel, quitte à en dresser un bilan et faire évoluer les choses plus tard. Pour l'heure, le Gouvernement préfère que l'on s'en tienne au télégramme d'avril 2002 (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP).

M. Claude Goasguen - Il faudra, tôt ou tard, faire un bilan et légiférer. Pour l'heure, je retire mon amendement.

L'amendement 165 est retiré.

L'amendement 252, mis aux voix, n'est pas adopté.

voir le compte rendu complet

 

Editorial de l'interassociative LGBT :
Couples binationaux, Sarkoy menteur ?

Obtenir des papiers quand on est étranger et en pacs avec une-e français-e n'a jamais été chose simple. Certaines préfectures refusent en effet d’appliquer les textes qui permettent d’obtenir une carte de séjour si la preuve d’une présence d’un an sur le territoire français est faite.

Septembre 2002, le ministre de l’Intérieur annonçait que les préfectures devront tenir compte « du caractère particulier que certaines situations peuvent présenter sur le plan social et humain » pour les régularisations de sans-papiers. Le cabinet du ministre nous assurait d'ailleurs que le ministre ne comptait pas revenir sur les
acquis du pacs. Tout ceci tombait bien face à une situation sur le terrain de plus en plus préoccupante.

Aujourd’hui, les préfectures multiplient les refus, et Nicolas Sarkozy vient de dévoiler un projet de loi allongeant le délai pour les étrangers mariés avec un-e Français-e à deux ans. On ne sait rien des intentions du ministre sur le pacs, mais il est évident que le délai d’un an du pacs sera également allongé, reléguant dans la clandestinité des centaines de couples de même sexe.

De là à dire que Nicolas Sarkozy et son entourage nous ont menti, il y a un pas, pas bien difficile à franchir...

 

Lemonde.fr

Le projet de réforme de Nicolas Sarkozy durcit les conditions d'entrée et de séjour des étrangers

LE MONDE | 09.04.03 | 13h30

La durée maximale de rétention administrative des étrangers passe de 12 à 60 jours.

Le projet de loi sur l'immigration est désormais fin prêt. Examiné depuis huit jours par le Conseil d'Etat, il est également étudié par la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH), qui s'en est saisi mardi 8 avril. Cette version finale, dont Le Monde a pu se procurer une copie, réforme la loi Chevènement en durcissant un nombre important de ses dispositions. Le projet, "second volet d'une réforme d'ensemble" sur l'asile et l'immigration, affiche clairement son objectif dès son préambule : "combler des failles dans le dispositif de contrôle des flux migratoires".

Rétention : c'est le changement majeur de la réforme. Le délai pendant lequel un étranger peut être placé en centre de rétention en vue de son éloignement – qui est actuellement de 12 jours – passe à 30 jours. Cette durée pourra être prolongée de 9 jours par le juge si l'éloignement n'a pu être exécuté "par défaut de délivrance" d'un laisser-passer du consulat, par absence d'un moyen de transport ou dans l'attente d'un "vol groupé".

"En cas d'urgence absolue ou d'une menace d'une particulière gravité à l'ordre public" ou si l'étranger a dissimulé ou détruit ses papiers permettant l'identification de son pays d'origine, la rétention pourra encore être prolongée de 30 jours, ce qui la porte, dans ce cas, à 60 jours. Le ministre justifie cet allongement, dans l'exposé des motifs de la loi, par un alignement sur les pratiques des autres pays européens, dont la plupart ont un délai de rentention supérieur à 60 jours. "Cette mesure est indispensable si notre pays veut restaurer, aux yeux des filières, sa crédibilité dans sa capacité à maîtriser les flux migratoires", indique le texte.

Attestation : les justificatifs d'hébergement nécessaires aux autorisations de séjour en France pendant moins de trois mois, seront désormais plus difficiles à obtenir. Jusqu'alors, les attestations étaient obtenues auprès de la mairie sur simple déclaration d'identité et présentation d'un justificatif de logement. Désormais, le maire pourra évaluer si les "conditions matérielles d'un hébergement normal" sont remplies avant d'accorder l'attestation et la refuser s'il juge le logement inadéquat ou s'il suspecte un "détournement de procédure".

Pour mieux exercer son "contrôle", le maire pourra faire appel aux services de l'Office des migrations internationales (OMI). Jusqu'alors gratuite, l'attestation sera désormais payante. Certains élus locaux avaient protesté contre l'absence de contrôle possible sur les précédents certificats d'hébergement, à qui ils reprochaient d'être des "attestations de complaisance".

Visas : cet autre verrou à l'entrée sur le territoire est également durci. Les consulats et ambassades seront appelés à relever et à mémoriser par un traitement informatique les empreintes digitales de tout étranger non communautaire désirant un visa de tourisme.

Un relevé d'empreintes, avec constitution d'un fichier, sera également pratiqué sur les étrangers contrôlés à la frontière et dépourvus de papiers en règle, afin de "parfaire le dispositif de contrôle de l'entrée des étrangers depuis la demande de visa (...) jusqu'à l'arrivée sur le territoire", commente l'exposé des motifs.

Séjour : les conditions d'obtention de titres de séjour se font, elles aussi, plus dures et rendent plus précaires un certain nombre de situations. Pour les étrangers titulaires d'une carte temporaire et désirant obtenir une carte de résident (de 10 ans), le délai d'attente passe de trois à cinq ans et ils devront prouver leur bonne "intégration". Cette condition sera également exigée des sans-papiers présents en France depuis plus de dix ans, régularisés par la loi.

Regroupement familial : cette disposition qui permet à un étranger de faire venir sa famille est restreinte. Ainsi, les étrangers entrant au titre du regroupement familial n'auront plus droit automatiquement à la carte de résident mais recevront une carte temporaire avant de pouvoir prétendre, là encore au bout de cinq ans, à la carte de résident, "sous réserve de l'intégration satisfaisante (...) dans la société française". Devrait être ainsi pris en compte un "faisceau d'indices" d'intégration comme la scolarisation, l'apprentissage de la langue, le suivi d'une formation, la participation à la vie associative ou le suivi d'un contrat d'accueil et d'intégration.

Le bénéfice du regroupement familial pourra dorénavant être refusé aux enfants nés en France mais repartis au pays sans leurs parents avant l'âge de 12 ans. Cette "pratique qui tend à se développer" serait à "l'origine de difficultés d'intégration", justifie le texte ministériel. Pour toute demande de regroupement, l'OMI communiquera au maire le dossier pour avis. Enfin, en cas de rupture de la vie commune, la préfecture pourra retirer ou refuser de renouveler la carte de séjour temporaire à l'étranger ayant rejoint son conjoint.

Mariages : un sort particulier est réservé aux mariages mixtes ouvrant droit à une régularisation. Pour "renforcer la lutte contre -leur- utilisation frauduleuse", la durée de vie commune nécessaire à l'étranger marié à un Français sera désormais de deux ans et non plus d'un an. Les mariages célébrés à l'étranger devront se faire en présence des deux époux, pour la publication des bancs comme pour la transcription sur les registres de l'état civil français, afin de permettre un contrôle plus strict des autorités consulaires.

Pour les mariages sur le sol français, le maire pourra demander ses papiers à l'étranger et surseoir à la célébration pendant un mois en cas de séjour irrégulier. Jusqu'alors, il ne pouvait s'opposer à la célébration. Durant ce délai, renouvelable une fois, le sans-papiers sera invité à se présenter à la préfecture. Cette dernière pourra saisir le procureur s'il "existe des indices sérieux" de suspicion de mariage blanc. Une nouvelle infraction passible de cinq ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende est introduite afin de condamner toute personne qui "organise, contracte ou tente de contracter un mariage simulé".

Paternité : la même suspicion est organisée contre les "paternités de complaisance". Tout parent d'enfant français avait jusqu'alors droit à une carte de résident à partir du moment où il pouvait prouver qu'il exerçait l'autorité parentale, même partiellement, ou qu'il subvenait aux besoins de l'enfant. Le projet de loi rend les deux obligations cumulatives "depuis la naissance de l'enfant ou au moins -depuis- deux ans".

Sylvia Zappi

© Le Monde 2003